Maitrisez le coût fiscal de la transmission à titre gratuit d’une entreprise grâce au « pacte Dutreil »

par | Fév 9, 2023 | Fiscalité des entreprises | 0 commentaires

Transmettre son entreprise à son (ses) successeur(s) figure parmi les souhaits de nombreux entrepreneurs.  

Le coût d’une telle transmission, en dehors du dispositif Dutreil, est très onéreux compte tenu des coûts potentiellement élevés des droits donations et successions (ci-après les DMTG).  

Pour réduire considérablement ces coûts et pérenniser le capitalisme familial en France le législateur a mis en place en 2005 le dispositif du pacte Dutreil permettant de réduire les DMTG mais également l’ISF (supprimé depuis).  

Le dispositif mis en œuvre s’est considérablement complexifié au fil du temps et il est important de se faire conseiller par des avocats fiscalistes au moment de la mise en place du Pacte mais également de la transmission afin d’assurer la sécurité juridique et fiscale de la transmission et éviter des contentieux avec l’Administration fiscale.  

Objectif du dispositif du Pacte Dutreil

 
 
 

Réduire l’assiette des DMTG de 75% de la valeur des parts ou actions de la société transmise.  

Pour rappel les DMTG sont calculés sur la base de la valeur vénale au jour de la donation ou de la succession (après déduction des éventuels abattements) à un barème progressif allant jusqu’à de 45% en ligne directe et 60% en ligne indirecte (voir le détail https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F14205). 

La donation pourra (sous certaines conditions) porter sur des titres en pleine propriété ou uniquement sur la nue-propriété des titres (permettant de réduire d’autant l’assiette des DMTG) pour autant que le donateur ait moins de 70 ans révolus à la date de la donation au-delà de cet âge l’abattement Dutreil ne portera que sur la valeur de la pleine propriété des actions (article 790 du Code Général des Impôts).  

Ainsi est-il nécessaire de bien anticiper ces opérations. 

Conditions générales du Pacte Dutreil :

Tout d’abord la société transmise doit : 

Avoir une activité de nature libérale, commerciale, industrielle, artisanale, agricole sur la durée des engagements de conservation des titres (cf infra). Ceci exclut les activités de gestion patrimoniale. Les activités de holding peuvent être admises au bénéfice du régime. Directement si elles sont « animatrices » (dans cette situation le régime porte directement sur leurs titres). En revanche si elle est passive, elle doit être signataire du Pacte et le régime Dutreil porte en fait indirectement sur les titres de la société opérationnelle détenue par le holding.  

Être soumise à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés. En revanche, les sociétés de gestion de patrimoine ne sont pas éligibles à l’exonération prévue par le pacte fiscal Dutreil : il s’agit principalement de la SCI, qui n’entre pas dans le champ d’application du dispositif Dutreil.  

Le donateur et au moins un autre associé de la société doivent prendre un engagement collectif de conservation des parts ou actions de la société sur une durée minimale de deux ans qui doit être enregistré auprès du centre des impôts (le Pacte). Cet engagement doit porter sur au moins 17% des droits financiers et 34% des droits de vote si la société est non cotée (ou 10% des droits financiers et 20% des droits de vote si elle l’est).  

A noter :  

Depuis 2019 l’engagement peut être pris par le donataire seul et ses ayants causes pour les entreprises unipersonnelles (des conditions spécifiques doivent être respectées dans le cas de société unipersonnelle) ; 

L’engagement collectif est réputé acquis si, lorsque le défunt ou le donateur, seul ou avec son conjoint ou partenaire pacsé : 

Détient depuis 2 ans au moins le quota de titres requis (10% des droits financiers et 20% des droits de vote s’il s’agit de sociétés cotées, et 17% des droits financiers et 34% des droits de vote pour les sociétés non cotées) 

– Exerce depuis 2 ans au moins son activité professionnelle principale s’il s’agit d’une société de personnes ou une fonction de direction selon s’il s’agit d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés 

Un des associés signataire du Pacte doit obligatoirement exercer une fonction de direction (gérant de SARL, Président de SAS …) sur la durée de l’engagement de conservation.  

Les héritiers et donataires doivent : 

Prendre un engagement individuel de conservation des titres pour une durée de quatre ans (dans l’acte de donation ou de succession) qui commence à courir à la fin de l’engagement collectif. Ainsi, a minima les engagements de conservation sont de 6 ans (2 collectifs +4 individuels).  

– L’un d’entre eux devra exercer une fonction de dirigeant (ou son activité principale pour les sociétés à l’IR), dans la société pendant au moins trois ans après la donation ou la succession et en attester annuellement auprès du centre des impôts.  

– Si aucun pacte Dutreil n’avait été conclu avant le décès, un engagement collectif de conservation peut encore être souscrit dans les 6 mois du décès par un ou des héritiers ou légataires afin de pouvoir bénéficier du dispositif (les autres conditions devant être remplies) 

En cas de non-respect des engagements (collectifs ou individuels) du Pacte l‘exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit est susceptible d’être remise en cause lorsque l’un des engagements ; collectif ou individuel de conservation en cours n’a pas été respecté. Selon la nature du non-respect, il est possible de faire une demande de mise en conformité auprès de l’administration sous certaines conditions. 

Le régime du pacte Dutreil est particulièrement favorable mais il est également l’objet de nombreux questionnements de l’Administration fiscale du fait de son coût élevé pour les finances publiques. Ainsi il est vivement recommandé de sécuriser en tout point ses conditions d’application pour en assurer le parfait fonctionnement et assurer ainsi la pérennité de l’entreprise familiale au fil des générations.

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